Voilà bien deux sujets de préoccupation à classer parmi les problèmes domestiques, si l'on fait un petit retour en arrière ...
En effet, dans les maisons à Paris régnait un froid glacial que de trop vastes cheminées, garnies de quelques bûches, parvenaient difficilement à réchauffer ...
Les appartements officiels, pourvus de hauts plafonds, de hautes portes et de non moins hautes fenêtres, protégeaient mal des courants d'air.
A ce titre, nous avons tous en mémoire l'image de Bonaparte aux Tuileries ou au Luxembourg, se rapprocher des cheminées, surveillant l'état du feu ...
C'est encore près de la cheminée, ou adossé tout contre qu'on le voit donner ses auduences.
Et à Saint-Cloud où s'installera toute la Cour, il ne fera pas moins froid ...
Pour combattre ce froid, quelques inventeurs se penchèrent sur la question, pour mettre en place des tuyaux de vapeur, dont le procédé se rapprochait étrangement de nos radiateurs actuels ...
Mais tout ceci restant au stade de l'expérimentation, le chauffage le plus couramment utilisé restait le bois que l'on faisait flamber dans la cheminée.
Quant à l'éclairage, dans la plupart des maisons bourgeoises, le problème n'était pas moins crucial ...
La lampe à pompe et la lampe Carcel n'étaient utilisés que pour les "grands jours" ...
Le reste du temps, c'était les bougies qui faisaient office d'éclairage ...
Avec un confort aussi rudimentaire, il est à penser que le coucher restait aussi un moment bien critique.
En effet, ne possédant pas encore d'allumettes (dont l'invention date de 1809, mais dont l'utilisation ne verra le jour que sous Louis-Philippe), l'on était contraint de se servir de veilleuses.
Et les chambres étant froides, il fallait se couvrir la tête, de madras pour les messieurs et de bonnets à brides pour les dames ...
C'est ainsi que tous nos héros familiers du Premier Empire s'exhibèrent dans l'accoutrement du malade imaginaire, dès le coucher et ce jusqu'au saut du lit...
Qui ne se souvient, en effet, du mouchoir noué sur la tête de l'Empereur, chaque matin lorsqu'il se levait pour travailler près de son secrétaire, ou même pour recevoir quelques ministres dans l'arrière de son Cabinet ?
En attendant que la flambée tiédisse enfin l'atmosphère de la pièce, robe de chambre et bonnet de nuit étaient admis chaque matin.
Ces conditions matérielles de la vie, la rareté de l'eau, la pauvreté de l'éclairage, les poussières du chauffage au bois, tout ceci entraînait un désordre jusque dans les appartements les mieux tenus.
Pour nous convaincre de cette dernière réflexion, Norvins évoque la toilette du duc d'Otrante ...
..."avec son bonnet de coton étalé près d'une savonnette, sur un coin de la cheminée, et lui-même en chemise, chaussé de pantoufles éculées, repassant un vieux rasoir d'oratorien et s'apprêtant à tondre sa barbe, du même teint jaune que son visage, devant un miroir à treize sous ..."
Quant à Madame de Genlis, le tableau n'est guère plus ragoûtant ...
Si l'on observait sa table de travail, en effet, on y trouvait pêle mêle, parmi des ouvrages de vers et des ébauches d'aquarelles, des brosses à dents, un encrier, deux pots de confitures entamés, des coquilles d'oeufs, un petit pain, un reste de café au lait, des fleurs en papier, un bout de chandelle, un tour de cheveux et un morceau de fromage de Brie !...
Et Napoléon disait d'elle :
-"Pauvre Mme de Genlis ! Quand elle parle de la vertu, elle a l'air de faire une découverte...
Si elle parlait de la propreté, le sujet ne lui semblerait pas moins nouveau ..."