Fuente de la Figueira (11.04) et Villena et Castalla (13.04)

Source : Journal de l'Empire du 5 mai 1813
"On annonce que le maréchal duc d'Albufera a de nouveau remporté un brillant avantage. l'armée anglo-espagnole, rassemblée sous les ordres du Lord Murray, menaçait depuis longtemps d'envahr la province de Valence. les renforts qu'elle avait reçu de Sicile, les efforts de la junte de Cadix, avaient réuni sur ce point des forces assez considérables.
Le maréchal duc d'Albufera résolut le 11 avril de faire une reconnaissance générale : il se porta à cet effet, au moyen de plusieurs marches forcées, sur Fuente de la Figueira , et attaqua le flanc de la division Ellio. Après une résistance assez vive, il parvint à culbuter les 6000 hommes qui la composaient, et fit 900 prisonniers.
Le lendemain 12, il se porta sur Villena et Castalla, attaqua l'ennemi avec vigueur, et après un combat opiniâtre, il fit mettre bas les armes à 2000 hommes, et entr'autres à 1100 du régiment de Malaga, l'un des plus beaux de l'armée espagnole.
Le 13, il eut quelques escarmouches, mais la partie de cette armée, qui n'avait pas pris part aux engagements des jours précédents, ne se montra pas disposée à tenter le sort des combats.
Les résultats de ces brillantes affaires sont près de 3.000 prisonniers, un général, 125 officiers, deux drapeaux, et plusieurs pièces de canon anglaises."

Source : Journal de l'Empire du 6 mai 1813

Ministère de la Guerre
Armée d'Aragon
Extrait d'une lettre de M. le maréchal duc d'Albufera, à S. Exc. le ministre de la guerre
San-Felipe, le 17 avril 1813

Monsieur le Duc,

depuis longtemps, les préparatifs des Anglais, les efforts des Espagnols pour recruter leur armée, et les renforts arrivés successivement de Sicile, me faisaient prévoir une attaque générale, d'autant plus sérieuse que les ennemis annonçaient hautement le désir où ils étaient de m'attaquer.
En conséquence, je me déterminais, par une marche forcée, à porter sur fuente de la Figuera, le 11 avril, seize bataillons d'infanterie, dix escadrons et douze bouches à feu. Je chargeai le général de division comte Harispe d'attaquer une division de 6000 hommes du corps d'elio à Yecla (1). Il arriva à la pointe du jour en vue de cette ville ; l'ennemi, sous les armes, fit une première résistance,traversa la ville pour se porter sur une position très escarpée, où il fut attaqué vivement. le général Harispe dirigea une avant-garde, aux ordres du colonel Meyer, mon premier aide-de-camp, sur la position où s'était retiré l'ennemi, qui se forma promptement en carrés. La résistance fut vive ; mais la valeur de nos troupes l'emporta ; l'ennemi fut poussé, la baïonnette aux reins, de position en position, jusqu'au moment où les hussards du 4e purent exécuter une charge, qui, d'abord repoussée et bientôt répétée, avec l'appui d'un piquet de dragons du 24e, parvint à renforcer les bataillons, et à faire mettre bas les armes à 900 hommes. le 7e de ligne, les voltigeurs des 44e et 116e achevèrent ladéfaite de l'ennemi, qui fut poursuivi pendant plus de trois lieues, laissant en notre pouvoir 1500 prisonniers de quatre plus anciens régiments d'Espagne ; 68 officiers, dont un général, un drapeau enlevé par l'adjudant sattonay, du 44e de ligne. Plus de 300 morts et 200 blessés sont restés sur le champ de bataille.
A peine cette brillante affaire était finie, que je fis avancer sur Villena dix bataillons des 1er et 5e divisions, avec les cuirassiers. le général Murray et le général Elio, à la tête de 1000 chevaux anglais, ou de la garde du roi de Sicile, quelqu' infanterie et des pièces, voulurent m'arrêter. Le général Habert marchait à eux, en même temps que 400 cuirassiers se déployaient sur le flanc droit. Bientôt les tirailleurs cessèrent, et je vis l'ennemi se retirer dans Villena ; quelques coups de canon enfonçèrent la porte, et le général Habert traversa aussitôt la ville avec son avant-garde. Les généraux ennemis s'étaient retirés sur Biar et sax. A mon entrée dans la ville, une vive fuillade partit du fort. J'ordonnai au colonel Estève d'en faire l'investissement avec un bataillon de son régiment, et au capitaine du génie Dupau, d'en barricader les avenues, ce qui fut fait très promptement et avec intelligence.
Le 12, à midi, le gouverneur me demanda une capitulation, que je lui accordai aussitôt. Il défila à la tête du régiment de Velez-Malaga, l'un des plus beaux, les mieux équipés et armés que j'aie vus en Espagne. Mille hommes, sous-officiers et soldats, 34 officiers, un colonel et un drapeau vinrent ajouter aux résultats de la journée du 11. Les Anglais virent, de Biar, défiler la garnison de Villena sans rien entreprendre pour la dégager. Le général Haliert, que j'avais chargé de les observer, marcha à eux, trouva le village de Biar crénelé, repoussa un parti qui l'occupait. Je vis bientôt sur des plateaux élevés l'ennemi forma sur plusieurs lignes, ayant de l'artillerie dans les intervalles.
(A suivre)

(1)Dans la province de Murcie

Le colonel Guillemet, à la tête de 600 voltigeurs, fut chargé par le général Habert de gravir les cimes qui dominaient la gauche de l'ennemi ; il parvint à l'en chasser, dans le même temps que le 1er léger abordait la ligne anglaise au pas de charge, et avec une haute valeur. Ce régiment eut à souffrir du premier feu ; mais bientôt il enleva la première ligne, soutenu par le 16e, qui prit une part glorieuse à cette affaire. Nos colonnes marchaient avec succès, par la droite et la gauche ; ce mouvement fut soutenu par cinq bataillons des braves du 3e léger, du 114e et 121e, aux ordres des généraux Robert et Lamarque. Les Anglais furent entièrement culbutés, et poursuivis de position en position ; à peine ils parvenaient à se former, que, débordés et attaqués de nouveau, ils précipitaient leur retraite, nous abandonnant deux pièces de canon et une centaine de prisonniers. Ils furent ainsi menés jusqu'à la nuit close, sous les retranchements et les redoutes de Castalla. je plaçai les dix bataillons qui avaient obtenu un si beau succès, au débouché de la vallée de Biar, décidé à rentrer dans mes positions du Xucar.
Cependant le lendemain, vers deux heures, je m'aperçus que l'ennemi occupait une immense montagne, à laquelle s'appuie Castalla. je me rappellai les diverses dépêches de V. Exc., et dès lors, pour compléter une reconnaissance qui nous avait donné tant de glorieux avantages, je décidai qu'une colonne de 600 voltigeurs reconnaitrait l'ennemi par notre extrême droite, tandis que quatre bataillons, par une fausse attaque, menaceraient la gauche de la montagne,et achèveraient la reconnaissance, dans le cas où le succès de la droite le permettrait. trop d'impétuosité dans nos braves troupes, et l'impulsion du succès de la veille, transformèrent en une attaque réelle ce qu'elles ne devaient que simuler. Des forces quadruples échelonnées sur les rochers, dont les ressauts sont tellement répétés, qu'il n'est pas plus permis de les franchir que de les juger à la vue, déterminèrent les chefs des colonnes qui étaient parvenues sur les sommités, à, rétrograder sur la position d'où elles étaient parties. J'avais toujours espéré que cette reconnaissance me ferait voir à fond la force de l'armée ennemie dans ses positions, où l'on ferait sortir, ce qui remplissait également mon but. En effet, au bout d'une heure, je vis toute l'armée anglaise déboucher derrière Castalla, et se former sur deux longues lignes. Je portai alors les bataillons de la 1ere division qui était formés en échelons, à la hauteur de ceux de la 3e. En cette position, j'attendais l'ennemi, qui, après avoir démontré une grande résolution de nous attaquer, fut arrêté par notre contenance et par douze bouches à feu que le général Vallée fit approcher et établir avec promptitude. Un seul bataillon anglais essaya de se glisser pour déborder notre gauche ; j'y envoyai le colonel Meyer : un bataillon du 16e repoussa vigoureusement cette attaque : le capitaine de grenadiers lacroix tua de sa main l'officier qui la commandait. l'ennemi borna là ses efforts, et rentra à la nuit dans ses retranchements. de mon côté, je suis rentré à Biard et Villena sans qu'il nous ait suivi.
(A suivre)

En résultat des combats des 11, 12 et 13, nous avons fait à l'ennemi 2.700 prisonniers, 114 officiers, et tué plus de 900 hommes ; deux drapeaux et deux pièces de canon sont en notre pouvoir. dans la dernière journée, j'avais laissé quatre bataillons de la dicision harispe à Villena, en observation sur Sax ; ainsi 4 bataillons ont combattuc ontre seize, dans des positions inaccessibles. Oze bataillons, y compris cceux qui venaient de se battre, ont été formés pour recevoir l'attaque de 40 bataillons anglais, hanovriens, calabrais et espagnols, tandis que l'ennemi a toujours évité d'offrir à notre cavalerie l'occasion de donner un coup de sabre.
Notre perte totale est de 800 hommes hors de combat, parmi lesquels le colonel Arbot tué, le chef d'escadron Colson, et le chef de bataillon Herenberger, grièvement blessé. l'ennemi nous a fait 41 prisonniers.
J'ai de grands éloges à donner aux généraux de division Harispe et Habert ; aux généraux Robert, Gudin et lamarque, pour leur vigueur constante ; ainsi qu'aux colonels Mayer et Guillemet, qui ont très bien conduit les avant-gardes. l'ordonnance Bondurand a su se porter partout ; et, par sa prévoyance et ses soins, tous les blessés ont été enlevés avec la plus grande promptitude.
Le lendemain 14, je suis rentré dans mes positions en avant de Xucar, sans que l'ennemi nous ait montré unseulcavalier, et après avoir sauter le fort de Villena.

Je suis, etc. Signé : le maréchal duc d'Albufera