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 Les Demi-Soldes

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Jean-Yves
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Jean-Yves


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MessageSujet: Les Demi-Soldes   Les Demi-Soldes Icon_minitimeMer 11 Mar - 22:38

Les Demi-Soldes (Bulletin n° 16), de Daniel Poisson


Avril 1814.


Les Bourbons arrivés dans les fourgons de l' étranger sont aux Tuileries. L'Empereur, abandonné de tous, est parti. Il ne reste rien.

Grenadiers, chasseurs, dragons, canonniers, alertes, farouches, soignés, dorés, empanachés, décorés, mal payés, ivres de gloire et d'amour n'ont vécu, souffert, que par Lui et pour Lui. On était de son Armée, on était de sa Garde, on ne le quittait-pas. Lui dont le regard faisait frissonner. On l'aimait Lui devant lequel les gueulards restaient bouche sèche ! On ne prisera plus son tabac, on ne verra plus sa capote grise brûlée au feu des bivouacs, ni son chapeau, les soirs de victoire.

À présent, c' est la cocarde blanche. C' est Louis Stanislas Xavier, dix-huitième...

Inconnu au bataillon. Bien sûr, il y a la France, la Patrie ... Mais la Patrie, c'était Lui. A quoi bon la vie ? Désemparés, désespérés, les "Vieux de la Vieille" ont perdu leur foi en une destinée grandiose. Mais ils sont condamnés à vivre.

Le 15 août 1814, des fêtes et des beuveries se déroulèrent dans de nombreuses casernes. Les vieux troupiers trinquèrent en ce jour-là, de la Saint-Napoléon, à la santé de leur Empereur. À pleine gorge, ils chantèrent des couplets dont le refrain disait tout leur espoir Bientôt le petit " Tondu " reviendra. !

Le mécontentement commençait à s'exprimer parmi les soldats qui regrettaient amèrement l' exilé. Dans ce domaine les fidèles de Napoléon sont les éléments cristallisateurs. Le roi a la maladresse de multiplier les demi-solde tout en recréant une Garde et une Maison dont tous les éléments n'ont porté le sabre que dans les rangs des cours européennes, coalisées contre la " République qui s'est donné un Empereur ", et reprennent du service actif souvent avec de hauts grades.

Inactifs, désœuvrés, ruminant leur rancœur, les fidèles se retrouvent près de l'Opéra, surnomment l'actuel boulevard des Italiens, le "boulevard du Retour de l'Île d'Elbe". D'autre part, Louis XVIII a laissé créer autour des Tuileries, comme jadis à Versailles, la Maison du roi, avec des compagnies de mousquetaires et de chevau-légers, Corps des Gardes de la porte et Gardes de Monsieur, régiments de Suisses, etc...

Le Ministre des Finances qui refusait aux vieux braves de Wagram et de Montmirail leur solde entière puisait largement

dans les caisses pour payer, loger, vêtir (et avec quels rutilants uniformes) ces guerriers de comédie .Tout bien pensé, bien qu' on mâchonne sa rage comme le tuyau d'un brûle-gueule, mieux vaut s'éloigner de Paris, puisque le roi n' a plus confiance et préfère confier sa personne aux 6000 Suisses, chouans, émigrés, soldats d'antichambre, et aux godelureaux de sa Maison que consentent à commander les traîtres transformés en mousquetaires.

Ceux de l' ancienne armée sont des brigands pour ces gens-là, ces impériaux sentent trop le cirage, le tabac et la caserne, allons-donc ! Le roi, ce podagre, a rogné la solde, n' en donne que la moitié à ceux qui ne lui plaisent pas, décore les forçats, s'imagine qu'il règne depuis 20 ans comme si, d'un trait de plume, on pouvait supprimer le " Tondu ", ses victoires et sa gloire. Avec de pareils gens, il vaut mieux s'en aller, c'est indigne d'être français. De vieux serviteurs sont à la retraite, d'autres sont réformés pour blessures, de nombreux soldats qui ont servi dans les département belges, hollandais, rhénans, italiens, suisses qui faisaient autrefois partie de l'Empire, sont considérés comme étrangers aujourd'hui et ne sont point repris ... une honte!

La liste des admis à la solde de non-activité, c'est à dire à la demi-solde de famine, est longue. Fin 1814, Soult, duc de Dalmatie, remplace Dupont au Ministère de la guerre. Les croix de la Légion d'Honneur sont avilies par l'entourage du roi. Le profil du créateur de la Légion d'Honneur est remplacé sur l'avers des étoiles par celui d'Henri IV. Le béarnais n'aurait jamais fait cela ! Les Hauts Dignitaires se hâtent de faire transformer leurs insignes, l'ancienne armée s'indigne. Les revues sont orageuses. Les fidèles de l'Epopée, tristes et impassibles, portent celles du " Tondu " sur leur cœur, à l'intérieur de leur habit et ceux qui sont à la demi-solde arborent sur leur capote râpée de larges rubans ou d'énormes nœuds, suivant leur grade, frisent leur moustache et font des moulinets en regardant les voltigeurs de Louis XVIII.

Pourtant, il faut vivre, mais on vit mal.. Chaque jour qui passe augmente le mécontentement du peuple et de l'armée. Début 1815, soulagés sont ceux de " l'Ancienne " qui écoutent les nouvelles qui parlent du " Père la Violette " Il reviendra. Pour les Cent jours. Ligny, dernière victoire... Waterloo ... Trahison ... L'île d'Aix, encore le sol français... Sainte-Hélène, la fin. L'Empereur n'est plus là.Les Vieux pleurent. Ces hommes de guerre rudes, indifférents au bien-être, unis par l'esprit de devoir et d'abnégation en une famille militaire ayant pour père l'Empereur, sentent, à cette heure, qu'ils sont orphelins et abandonnés. Habitués aux coups de tonnerre imprévisibles, autant que bercés par leurs rêves vers les sommets de l'honneur et de la gloire, ils ont cru qu'Il resterait pour guider le Roi de Rome, mais les traîtres ont rappelé les Bourbons apportant la misère et l'humiliation.

Ceux que, pendant vingt ans, le peuple de France a fêtés, acclamés, adulés et qu'il repousse aujourd'hui par lassitude, peur, lâcheté, ingratitude, s'en vont retrouver un foyer, un champ, une armoire pour ranger les vieilles frusques brossées, les larmes aux yeux, le 15 août et le 2 décembre, parce qu'on les remettra peut-être un jour, quand "Il " reviendra, un cadre pour accrocher les titres de noblesse, le congé et la croix, des gosses pour apprendre l'exercice, des amis pour écouter les veillées de Schoenbrunn et la retraite de Russie, des "anciens" avec lesquels, les jours de marché, on trinque à l'Autre. Il y a ceux que la police surveille. Dans des garnis de misère, ils vivent, en chambrées, expédients ou de menus travaux. Tracassés, aigris, ils bousculent les ultras, les tuent en duel, disparaissent, gagnent la frontière ou se suicident. Il y a des victimes de la politique, de la haine, des bandits qui tuent au nom du roi l'élite de la Grande Armée. Brune, assassiné, finira dans le Rhône ; Ney, "le brave des braves" sera fusillé comme le jeune La Bédoyère rallié à Napoléon au retour de l'Île d'Elbe et combien d'autres encore

Il y a ceux qui conspirent avec ou sans espoir, pour se griser d'action et de souvenir. Cest l'occasion de parler de "l'Autre ". Il y a ceux qui étranglent de rage et préfèrent s'expatrier. Ils sont bien accueillis. Ils vont jusqu'en Hongrie, en Turquie, en Perse, en Amérique, "terre de liberté et champ d'asile". Mais une foi irraisonnée, invincible, dans la destinée grandiose de l'Empereur anime ces fidèles officiers et ces braves soldats. "Il" reviendra, car il est plus malin que ces "cochons de royalistes". "Il" reviendra ! Dieu soit loué !


Les Demi-Soldes Demi-s10

L'adaptattion cinématographique du livre "Les Demi-soldes" de G. d'Esparbès, 1933

Il revient ce quinzième jour de décembre1840, dans cette capitale qu'il a façonnée avec son génie hors du commun, pour venir dormir de son dernier sommeil."Au milieu de ce peuple français qu'il a tant aimé !"

A cette nouvelle, des spectres resurgissent, on retrouve là de vrais soldats, tous les anciens uniformes tirés de leur poussière et que les vers ont épargnés. Cassés, chancelants, estropiés, tirant la jambe, ils prennent place derrière le char funèbre, derrière leur Empereur. La foule les remarque et les salue. Tous portent à la boutonnière un brin de laurier arraché, en ce matin froid, aux guirlandes qui entouraient le cercueil de l' Impérial défunt. Des vétérans sont venus de Belgique, de Rhénanie... Ils descendent maintenant les Champs-Élysées au son du canon, parmi les drapeaux tricolores et les aigles.

On savait bien qu"Il" reviendrait.

A l' Hôtel des Invalides, le général Petit, celui des Adieux de Fontainebleau, les salue ; le maréchal Moncey, Gouverneur, l' Armée, la Garde Nationale, tout Paris les accueille. Ce qui fera dire au vieux Moncey, qui avait supplié une prolongation à son médecin :

" A présent rentrons mourir ! "



Sources

-Les Demi-solde, Georges d'Esparbès, Calmann-Lévy.

-Vétérans, Débris, Frères d'armes, capitaine Maurice Bottet 1906.

-Les Demi-solde, Jean Vidalenc, librairie Marcel Rivière 1955.

-La Terreur Blanche, Jean Lucas-Dubreton, le Club du Prix d'Histoire 1957.

-Le culte de Napoléon, Jean Lucas-Dubreton, 1960, Albin Michel.
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MessageSujet: Re: Les Demi-Soldes   Les Demi-Soldes Icon_minitimeJeu 12 Mar - 21:36

flower un mot - MERCI flower
Amicalement et salut
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