J.R. COIGNET :
..." L'Empereur passa la Bérézina à 1 h. de l'après-midi et alla établir son quartier-général dans le petit hameau de Zaniwski. le passage de la rivière continua dans la nuit du 27 au 28 novembre. L' Empereur, avant de passer le pont de droite, fit appeler le maréchal Davout pour garder la tête de pont pour ne laisser passer que l'artillerie et les munitions, le marécahl à droite et moi à gauche.
Lorsque tout le matériel fut passé, le maréchal me dit :
" Allons mon brave ! tout est passé, allons rejoindre l'Empereur. "
Nous traversâmes le pont et un marais profond, heureusement il était gelé et pouvait porter notre matériel. Durant ce pénible service, l'Empereur faisait de bonnes affaires avec les Russes. il les avait renversés à gauche dans les bois avec le duc de Reggio; et le maréchal Ney avait taillé en pièces les Russes qui remontaient pour nous couper la route. Nos troupes les avaient surpris en plein bois et cette bataille coûta cher aux Russes. Nos braves cuirassiers les ramenaient par mille, couverts de sang; c'était pitié à voir.
Nous arrivâmes sur ce beau plateau; l'Empereur passait les prisoniers en revue. la neige tombait si large que tout paraissait couvert. On ne se voyait pas mais derrière nous il se passait une scène des plus effraynates : à notre départ du pont, les Russes dirigèrent sur la foule qui entouraient les ponts, les feux de plusieurs batteries, qui firent sur ces masses effrayées un effroyable ravage.
De notre position l'on voyait la foudre tomber sur ces malheureux abandonnés sans pouvoir leur porter secours. ils se précipitaient vers les ponts et les voitures se renversèrent et la confusion fut si grande qu'ils se renversèrent dans la Bérézina et furent engloutis dans les glaces. Non personne ne peut se faire à l'idée d'un pareil tableau ! Combien de personnes de tous sexes et de tous âges restées sur la rive gauche ! Les ponts brûlèrent le lendemain matin à 8 h. et demie. 5.000 personnes périrent à la Bérézina et un riche butin. "...