Maréchal NEY NEY (Michel), 1769-1815, Maréchal d'Empire (1804), Duc d'Elchingen (1808), Prince de la Moskowa (1812). Né à Sarrelouis, fils d'un tonnelier, clerc de notaire, puis engagé en 1788 aux hussards, brillant chef de cavalerie pendant les guerres de la Révolution, général en 1796, Maréchal en 1804, servit magnifiquement pendant les campagnes napoléoniennes et fut sacré :
« brave des braves ».
NEY ne passa pas comme MASSENA, SOULT ou JUNOT pour s'enrichir scandaleusement des dépouilles des peuples vaincus ; il fut par contre un des officiers généraux que NAPOLEON combla particulièrement de présents et de faveurs.
En dehors de ses appointements, de ses dotations de duc (200 000 francs) et de prince (500 000 francs) et de ses gratifications d'entrée en campagne — tous les Maréchaux touchèrent un million-or avant la seule campagne de 1809 —, NEY obtint : une dotation de 28 326 francs de rente perpétuelle sur le grand-duché de VARSOVIE (1807), de 17 647 francs sur le Grand Livre de la Dette Publique (1807), une de 100 000 francs de rente sur les biens réservés en WESTPHALIE (1808), une de 83 000 francs de rente perpétuelle sur les biens réservés en HANOVRE(1808), une de 800 000 francs de rente annuelle sur ROME, le MONT-de-MILAN, la WESTPHALIE et le HANOVRE, et ainsi de suite...
Comme les autres Maréchaux, NEY donnait des signes de lassitude pendant la Campagne de France. Le 4 avril 1814, apprenant que le quartier général de NAPOLEON allait se transporter de FONTAINEBLEAU à PONTHIERRY, en vue de l'attaque de PARIS, les maréchaux se révoltèrent. Ils avaient dans la capitale leurs fastueux hôtels, leurs biens, leur famille. Ils faisaient la guerre depuis plus de vingt ans presque sans débrider, ils entendaient jouir enfin de leurs immenses fortunes et, pour ce faire, contraindre leur chef et bienfaiteur à abdiquer.
Telles furent les raisons de cette « Trahison des Maréchaux » tout à fait distincte de la défection individuelle de MARMONT, et qui groupa : NEY, BERTHIER, LEFEVRE, MONCEY, OUDINOT. « Ainsi, entre ces cinq hommes, écrit Marcel DUPONT, se conclut un pacte honteux, sans excuse. Ils pouvaient en conscience estimer devoir se séparer de leur chef, mais ils devaient accomplir ce geste loyalement, en lui remettant leur épée, en abandonnant leur commandement, en redevenant au moment même de simples citoyens.
Ils s'en gardent. Messieurs les Maréchaux d'Empire sentent le peu de poids qu'aurait alors leur intervention. Se produisant au contraire avec toute la force représentée par les milliers d'hommes qu'ils groupent derrière eux, elle devient irrésistible, elle arrache aux mains de l'EMPEREUR l'épée qu'il a forgée, elle le laisse seul et désarmé en face de deux cent mille ennemis...
"L'histoire les jugera" : ainsi ... OUDINOT, LEFEVRE et MACDONALD se présentèrent à l'EMPEREUR et lui déclarèrent qu'ils ne marcheraient pas sur Paris. « L'armée du moins me suivra », dit NAPOLEON. « — L'armée obéira à ses Généraux », répliquèrent NEY et OUDINOT. « — Que pensez-vous donc, que je dois faire ? » dit NAPOLEON, « —Abdiquer », répondirent NEY et OUDINOT.
Et le Grand Homme « aux prises avec des dévouements fatigués, des intérêts repus, impatients de soustraire leurs honneurs et leur fortune aux hasards d'une plus longue lutte, céda, écrivit son abdication en faveur d'une Régence».
C'était le jour où un journal de Paris occupé par les Alliés annonçait textuellement : « L'armée ennemie qui est à Fontainebleau... » et que les émigrés acclamaient : « leurs bons amis les ennemis ! ».
Le lendemain, NEY revint annoncer à NAPOLEON que les Alliés exigeaient de lui une abdication pure et simple. « Sa parole fut sans ménagement. » (VAULABELLE.) Le Maréchal NEY, qui venait d'informer M. de TALLEYRAND de sa résolution d'embrasser « la cause des anciens Rois », arracha à l'EMPEREUR sa seconde abdication, sans conditions…
Lors du retour de l'Ile d'ELBE de NAPOLEON, NEY se rend chez le Roi et déclare que BONAPARTE « s'il était pris, mériterait d'être mis dans une cage de fer » ; le Roi lui donne le commandement de l'armée du Jura pour barrer la route à l'« Usurpateur ».
Mais, à LONS-le-SAULNIER, pressé par les émissaires de l'EMPEREUR et voyant ses troupes prêtes à se révolter, NEY, troublé, consulte ses subordonnés : BOURMONT, l'ancien chef royaliste, ne veut se compromettre ni dans un sens ni dans l'autre, tandis que LECOURBE, ancien républicain, entend rester fidèle à son serment au Roi.
NEY décide enfin de se rallier au "Drapeau Tricolore" et lit aux troupes qu'a rassemblées BOURMONT une proclamation qui commence ainsi :
« La cause des Bourbons est à jamais perdue ! La dynastie légitime que la nation a adoptée va remonter sur le trône. C'est à l'EMPEREUR NAPOLEON, notre Souverain, qu'il appartient seul de régner sur notre beau pays... Soldats, les temps ne sont plus où l'on gouvernait les peuples en étouffant tous les droits; la liberté triomphe enfin..., etc. »
Après WATERLOO où son courage indomptable ne racheta pas de graves fautes de tactique, NEY jeta l'alarme dans la Cour des Pairs en exagérant les pertes Françaises en BELGIQUE et en s'inscrivant en faux contre le rapport modéré et exact du Ministre de la Guerre.
Le fougueux et fidèle LABEDOYERE le stigmatisait en ces termes : « Malheur à ces Généraux vils qui l'ont déjà abandonné (NAPOLEON) et qui peut-être en ce moment méditent de nouvelles trahisons. » Puis il fixa NEY en s'écriant : « ...Plus de traîtres, plus de ces manœuvres qui ont occasionné les dernières catastrophes et dont peut-être quelques auteurs siègent ici. »
C'est le défaitisme de ces Maréchaux qui fut le signal du « sauve-qui-peut "politique" dont NEY devait payer le résultat de sa vie» (VAULABELLE).
Le Maréchal NEY, qui avait une seconde fois abandonné l'EMPEREUR, devait tomber sous le peloton d'exécution comme le Général qui l'avait soutenu jusqu'à la dernière heure.
Voici le jugement de NAPOLEON à Sainte-Hélène, sur le maréchal NEY : « C'était un BRAVE, personne ne l'était plus que lui ; mais c'était un fou ; il est mort sans emporter l'estime de personne ; il m'a trahi à Fontainebleau. La proclamation contre les Bourbons, qu'il a dit dans sa défense tenir de moi, a été composée par lui-même, et je n'en avais pas entendu parler avant qu'elle fût lue aux soldats. Il est vrai que je lui avais fait passer l'ordre de m'obéir. Que pouvait-il faire ? Ses troupes l'abandonnaient. » (O'MEARA.).
Au procès de 1815, devant la Cour des Pairs, la haineuse déposition de BOURMONT emporta la condamnation à mort de NEY.
Il est curieux de noter que si certains membres de « l'Ancienne Noblesse », tels que CHASSELOUP-LAUBAT, CHOISEUL, BROGLIE, MONTMORENCY, d'ALIGRE, LALLY-TOLLENDAL, s'abstinrent ou votèrent la
déportation,...
...
mais tous les camarades, anciens chefs ou anciens subordonnés du Maréchal NEY— sauf le général CURIAL — votèrent « sa mort », pour se faire bien noter du nouveau régime :
Ce furent les « Maréchaux MARMONT (d'Essonnes), SERURIER, PERIGNON, KELLERMANN et VICTOR, les Généraux DUPONT (de Baylen), COMPANS, LAURISTON, DESSOLES, MONNIER, BEURNONVILLE, MAISON et l'Amiral GANTHEAUME ».