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 Marie Jeanne Véronique Vivien, épouse Desmarest

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Jean-Baptiste
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Jean-Baptiste


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MessageSujet: Marie Jeanne Véronique Vivien, épouse Desmarest   Marie Jeanne Véronique Vivien, épouse Desmarest Icon_minitimeMer 16 Déc - 7:26

...... Marie Jeanne Véronique Vivien, épouse Desmarest Icon_sunny ...... ...Il Déserte...Véronique le Remplace...



Marie Jeanne Véronique Vivien, épouse Desmarest Objetslivre00030 (Sources Jean de Kerdeland...1956)


Marie Jeanne Véronique Vivien, épouse Desmarest Harponville.....Vue du village d'Harponville.

Courageuse cette femme...!!!...Voici l'histoire de Véronique Vivien.


En 1814, vivait à Harponville, canton d’Acheux, petite commune perdue dans la plaine Picarde à quatre kilomètres de Contay, un couple assez mal assorti. Le mari, Jacques Desmarest, obscur journalier, était un petit homme chétif et souffreteux, affligé de surcroît d’une incroyable timidité et qui n’avait de plus cher désir que de passer toujours inaperçu.

A côté de ce falot personnage, sa femme faisait figure de dragon. Marie Jeanne Véronique Vivien, épouse Desmarest, que l’on appelait couramment Véronique, semblait avoir drainée à son profit le peu de virilité qu’eût jamais possédé son pauvre homme de mari. A une stature imposante, renforcée encore par un embonpoint précoce, elle joignait le prestige certain que confère une langue bien pendue, un esprit décidé et une hardiesse à toute épreuve.

Depuis qu’il avait épousé cette femme forte, le 18 brumaire, an X (9 novembre 1801), le journalier n’avait guère cessé de trembler. Non pas qu’elle lui fit la vie dure, certes. Véronique était une femme décidée, mais une excellente compagne, au demeurant. Ce qui opposait ces deux époux si disparates d’allures et de tempérament, c’était tout simplement…la politique !

Jacques Desmarest, que la nature n’avait point doué pour des actions d’éclats, craignait sans cesse qu’on l’appelât sous les drapeaux. Le grand Napoléon, pour glorieux qu’il fût, faisait une effroyable consommation d’hommes…il en laissait un peu partout sur tous les champs de bataille d’Europe.

Bien qu’il admirât l’Empereur…à peu près comme un lièvre peut admirer un lion….le journalier ne se souciait guère de lui apporter le modeste concours de son bras débile. Il avait mieux à faire chez lui, dans sa pauvre masure de Harponville, où quatre enfants en bas âge réclamaient leur pitance. Il avait prénommé l’aînée de ses quatre filles Joséphine, mais c’était l’unique concession qu’il voulût faire à l’Empire.

Véronique, au contraire, du fond de sa campagne, vivait intensément l’Epopée. Elle se faisait lire les journaux, les bulletins et les proclamations impériales et s’exaltait à l’audition des périodes ronflantes, toutes frémissantes de gloire, que contenait cette littérature.

Bientôt, elle ne rêva plus que de plaies et bosses…elle fredonnait la chanson d’Austerlitz en taillant la soupe et faisait manœuvrer son mari et ses enfants comme un sergent-major instruisant ses recrues. Tout cela n’avait rien de bien grave, mais la situation s’envenima à mesure que se précipitaient les évènements qui devaient conduire la France impériale au désastre.

Quand vint 1814, avec un cortège de deuils et de tristesses, les sentiments patriotiques de Véronique Vivien furent mis à rude épreuve. La Picardie était envahie et les moindres villages occupés par les Alliés….les réquisitions pleuvaient sur les pauvres gens des campagnes, opprimés par des exactions sans nombre.

Aussi peut-on imaginer avec quelle allégresse la vaillante épouse du journalier apprit le retour de l’île d’Elbe et le vol triomphal de l’Aigle, de clocher en clocher. Jacques ne voyait pas les évènements avec le bel optimisme qui animait son épouse. Pour faire la guerre, il fallait des soldats. On allait sans doute procéder à de nouvelles levées d’hommes, et des milliers de Français seraient arrachés à leur champ, à leur forge, à leur échoppe.

Ainsi raisonnait Jacques Desmarest, avec son robuste bon sens de paysan qui n’entend rien aux grandes choses, mais se connaît fort bien aux petites. A son tour, il se mit à épier les nouvelles, toujours sur le qui-vive, tremblant d’être compris dans une levée quelconque et prêt au besoin, à se joindre aux bandes de réfractaires qui battaient la campagne.

Pour se rassurer, il se répétait qu’il était père de famille et qu’il approchait de la quarantaine. Sans doute ne l’appellerait-on pas. Il ne manquait point de jeunes hommes et de célibataires, que diable ! que l’on pouvait enrôler avant lui. Hélas !..... Le Picard se trompait. Il ignorait, ce pauvre homme, les dispositions du sénatus-consulte du 10 avril, portant mise en activité permanente des gardes nationaux.

Celles des départements du Nord devaient se réorganiser immédiatement et constituer des bataillons destinés à fournir des garnisons aux places fortes de la frontière. La Somme, pour sa part, avait à fournir…. 63 Compagnies de grenadiers et de chasseurs. C’était un vieux briscard, le général Sébastiani….le propre père de cette malheureuse duchesse de Choiseul-Praslin, qui sera plus tard égorgée par son mari…que l’on avait envoyé sur place pour activer la levée.

Cette fois, Jacques Desmarest ne pouvait se soustraire à son devoir envers la patrie. Malgré son âge et ses quatre enfants, il fut recensé, enrôlé et affecté au… 5è bataillon d’élite des gardes nationaux de la Somme. Le journalier partit la mort dans l’âme, en dépit des vibrantes exhortations de sa femme. Il embrassa ses mioches, posa un timide baiser sur le front de Véronique et s’en fut à petits pas, son baluchon sur l’épaule.

Malgré leur nom pompeux de Grenadiers d’Elite, c’était d’assez misérables troupes, que les gardes nationales, ainsi rappelés à l’activité. Le bel enthousiasme de la Révolution et des premiers temps de l’Empire était mort depuis longtemps et ce fut sans aucune conviction que la plupart des recrues, ayant en général dépassé la trentaine et dont beaucoup, pères de famille, n’avaient jamais servi, s’acheminèrent vers la frontière.

Desmaret se rendit à Doullens, ainsi que le lui enjoignait sa feuille de route. Il y arriva au début de mai, alors que la formation du 5è bataillon commençait à peine. Tout d’abord, ce fut une indescriptible pagaïe…puis le commandant d’Armes et l’inspecteur aux Revues d’Amiens étant venus visiter les recrues, le chaos, peu à peu… s’organisa.

Néanmoins, quel pauvre bataillon que le 5è !.... Son chef, le commandant Jomard, ne pouvait guère s’en enorgueillir. Il ne comptait qu’une vingtaine d’officiers et un peu plus de 500 hommes, par la suite, cet effectif squelettique devait se trouver encore diminué par une véritable épidémie de désertion.

Plein d’une morne tristesse, abruti, dépaysé, le paysan de Harponville, simple matricule sur une liste, fut versé à la…. 6è compagnie, capitaine Langlet. On lui donna un bonnet de police, une capote beige, un col noir, une paire de chemises et de grossiers brodequins qui blessaient ses pieds habitués aux sabots…c’était-là tout l’équipement qu’il avait été possible d’obtenir des magasins aux trois quarts vides.

Les 4è et 5è bataillons d’élite de la Somme étaient désignés pour la garnison de Maubeuge. Ils partirent donc de Doullens à destination de la ville frontière, par détachements fractionnés. La 6è compagnie où sert notre Desmarest,…. quitte Doullens le 31 mai pour gagner sa garnison. En cours de route, on perd 56hommes, dont 26 ne rejoindront jamais et seront portés déserteurs.

Le journalier est au nombre des traînards…dès le 3 juin, il disparaît. Mais ce pauvre hère, qui n’a pas le courage de servir, n’a pas encore pu trouver celui de déserter. Le 9, après avoir vagué à l’aventure, il rejoint enfin Maubeuge où son bataillon est arrivé depuis 6 jours déjà.

Ce sont de tristes temps que l’on vit à Maubeuge, tandis qu’on met la place, tant bien que mal, en état de défense. Les nouvelles sont mauvaises et plus d’un soldat sent son courage, déjà bien chancelant, l’abandonner tout à fait.

Après le 18 juin et la déroute de Waterloo, les gardes nationaux Picards qui voient affluer sur les routes, autour de la ville, les débris des vieilles troupes de ligne dispersées en désordre, sont à leur tour pris de panique et désertent en masse. Cette fois Desmarest n’y tient plus…le 27, il déserte aussi….

Quelques jours plus après, le grenadier Jacques Desmarest, de la 6è compagnie du 5è bataillon, reparaît soudain à Maubeuge où l’on rédigeait déjà la volumineuse paperasse destinée à faire ultérieurement sanctionner, par un conseil de guerre, la conduite des déserteurs.

C’est tout un autre homme que celui qui se présente devant ses chefs et sollicite sa réintégration au sein du bataillon qu’il a si lâchement déserté. On ne sait à quoi imputer ce miracle, mais le fait est patent…Desmarest le faible, Desmarest le capon, s’est changé soudain en un vaillant soldat qui brûle de servir aux côtés des siens et de se distinguer dans les opérations du siège de Maubeuge qui viennent de commencer.

Il manifeste le plus profond repentir de sa conduite passée et ne demande qu’une chose…qu’on lui permette de se réhabiliter en donnant la mesure de son courage et de son dévouement. On ne saurait tenir plus longtemps rigueur à un soldat qu’animent de si bonnes intentions…la poursuite en désertion est annulée et Desmarest réintégré dans sa compagnie.

Il n’a pas menti lorsqu’il a prétendu vouloir se racheter. Pendant les courtes opérations du siège de Maubeuge, il fera preuve de la plus grande bravoure et se distinguera en toutes circonstances, par son courage et sa bonne volonté. Il reçoit plusieurs blessures, heureusement bénignes, et n’en continue pas moins à faire vaillamment son service. Son sergent lui conseille d’apprendre à lire…il pourrait passer caporal.

Chose étonnante, le grenadier Jacques Desmarest, dont le moral a subi une si heureuse transformation au physique ! …..Il est plus grand, plus solidement découplé qu’avant sa désertion, il marche avec plus d’assurance, le son même de sa voix est différent, jurerait-on !

Il y a là un phénomène bien surprenant et qui mériterait d’être étudié plus attentivement, mais l’heure n’est pas à des études de ce genre. Au milieu de la grande déroute environnante, les défenseurs de Maubeuge font désespérément leur devoir, tout en se demandant avec une inquiétude croissante ce qu’apportera le lendemain. Les officiers ne connaissaient même pas leurs hommes et n’ont guère le temps de se préoccuper de cas particuliers, si curieux soient-ils. On se bat,…. on se bat, sans espoir, mais aussi sans défaillance, on se bat.

......A.....Suivre.....


Marie Jeanne Véronique Vivien, épouse Desmarest Salut

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Jean-Baptiste Guindey, 1785-1813
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MessageSujet: Re: Marie Jeanne Véronique Vivien, épouse Desmarest   Marie Jeanne Véronique Vivien, épouse Desmarest Icon_minitimeMer 16 Déc - 18:26

Vous nous avez à nouveau déniché une perle, mon cher Bernard !
Ce récit est prenant et même si l'on devine aisément la suite, je l'attends avec impatience... sunny
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Jean-Baptiste
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MessageSujet: Re: Marie Jeanne Véronique Vivien, épouse Desmarest   Marie Jeanne Véronique Vivien, épouse Desmarest Icon_minitimeJeu 17 Déc - 8:01

...... Marie Jeanne Véronique Vivien, épouse Desmarest Icon_sunny ...... ...Il Déserte...Véronique le Remplace...

Marie Jeanne Véronique Vivien, épouse Desmarest Objetslivre00030 (Sources Jean de Kerdeland...1956)...Suite et Fin....


Marie Jeanne Véronique Vivien, épouse Desmarest Medaillesthelene....La Brave Véronique Vivien... reçut cette récompense combien méritée....!



Enfin, le jour arrive qu’il faut déposer les armes…l’Empire n’est plus, « vive le roi » ....les gardes nationales sont licenciées et chacun reprend le chemin de son foyer, le grenadier Desmarest comme les autres. Il porte encore sa vieille capote brune et, par faveur spéciale il a obtenu d’emporter son fusil qu’il accrochera chez lui, au dessus de la cheminée. Sur la route, il rencontre un soldat du 4è bataillon qui rentre lui aussi « dans ses foyers », et l’on fait chemin ensemble, en devisant….. « Je m’appelle Colin Vasseur, de Chichery. J’étais dans la compagnie du capitaine Merle. On en a vu de dures…Et toi ?....Moi, je me nomme Jacques Desmarest, et je m’en retourne chez nous, à Harponville. L’ami de rencontre s’est arrêté court…Dis donc, fait-il soudain, mi-plaisant, mi-colère, tu te fous de moi ! Jacques Desmarest, d’Harponville, je le connais, j’ai travaillé avec lui, l’an dernier, à la ferme de maît’Nollet, sur Acheux, pour les betteraves….. ».

Tout à coup, il part d’un rire formidable et assène une grande tape sur le dos de son compagnon…. « Sacré farceur, va ! Alors tu voulais me faire croire que tu était Jacques Desmarest ?... Pas de chance mon collègue !..... Je le connais je te dis le Jacquot ! C’est un tout petit bonhomme, le Jacquot, haut comme une botte, et maigre comme un échalas. Avec ça pas plus de courage qu’un lièvre. »

Et Colin Vasseur se met à rire de plus belle en évoquant ce souvenir. Son camarade de rencontre à l’air fort embarrassé…. « Ecoute, en tirant par la manche le soldat qui s’éloigne paraissant fâché….je suis sa femme à Desmarest, Véronique Vivien. »….. De saisissement, l’autre en laisse choir son baluchon…. « Toi une femme ?....Oui…. »…L’homme se rapproche et il examine attentivement son compagnon…sa compagne, faudrait-il dire qui rougit sous son hâle.

Alors le grenadier Véronique Vivien se décide à expliquer à son frère d’armes, comment elle a pris la place de son mari. « Celui-ci n’est pas un mauvais homme, mais il n’est pas très courageux. On ne peut rien dire à ça…on est comme on est, voilà tout….Alors, quand il est parti pour Doullens, j’ai mis mes enfants chez des voisins et je l’ai suivi….Après, je l’ai encore suivi à Maubeuge, ou j’ai servi comme vivandière….Un jour, j’ai su qu’il avait….qu’il avait déserté, quoi ! ».

« Je m’y attendais, tu comprends, mais ça m’a tout de même fichu un coup….Alors je suis venue et j’ai pris sa place. C’est tout. »…..C’est tout en effet, cette brave Picarde, mère de quatre enfants, trouve tout naturel de se substituer à son mari défaillant pour aller se battre à sa place !

Elle regagne sa pauvre masure de Harponville et y retrouve Jacques, plus timoré que jamais, en train de préparer le repas des mioches. Il tressaille au bruit que font, sur le seuil les bottes « du militaire ». La vue de l’uniforme le terrorise à ce point qu’il ne reconnaît même pas sa femme. Il croit qu’on vient l’arrêter pour désertion, et ses mains tremblantes laissent échapper le couteau de la miche…. « Allons, fait Véronique, qui accroche son fusil au manteau de la cheminée, tu vois bien que c’est moi, ta femme »…..et la vie reprend, comme avant.

Desmarest, bien heureux de savoir qu’il n’a pas déserté et qu’il ne peut être poursuivi de ce chef. D’ailleurs, l’Empire s’est écroulé, et le roi promet la paix….Véronique a dépouillé son glorieux uniforme de grenadier et vaque de nouveau aux besognes du ménage, c’est à peine parfois, si elle lève les yeux vers son fusil avec un petit soupir.

Jacques, qui n’est pas un homme pour la guerre est un homme tout de même….il fait à sa femme un cinquième enfant et la misère s’installe au foyer. Véronique est courageuse…elle l’a bien montré…et elle n’a que trente cinq ans. Mais le travail manque, la vie augmente…Et puis, que pourrait-elle faire, avec cinq marmots qui réclament ses soins constants, à la maison ?

Les époux Desmarest vivront… tout de même, mais si mal ! En 1834, ils sont déjà âgés et les voilà réduits à l’indigence. Le maire de leur petit pays, un certain…. Froment, s’intéresse alors à leur sort. L’histoire de Véronique s’est répandue et on admire fort la « grenadière », au village. Froment prend une belle plume tout frais taillée et signale au préfet de la Somme la pénible situation de cette intéressante personne.

« Cette moderne Jeanne d’Arques (sic), écrit-il, sans autre motif que le désir de défendre nos frontières, abandonna en 1815 la maison conjugale et vola en héroïne se ranger sous les aigles françaises où elle se signala par son intrépidité et ne revint dans ses foyers qu’après avoir obtenu son congé…Elle vous prie de lui octroyer, pour récompense de son ancienne valeur guerrière, vertu si rare dans une femme, une place de portière dans les bâtiments publics de votre département. »

L’excellence de l’intention perce sous la naïveté du style. Pourtant, les années s’écoulent et il n’est pas fait droit à la requête de la femme soldat. Le maire se décide alors de solliciter une nouvelle fois pour elle et il renouvelle son placet au préfet.

« Je vous supplie d’avoir la bonté de vous intéresser pour elle, ayant mérité par son courage et sa valeur, ainsi que cela vous est attesté par le certificat de son capitaine et de son sergent instructeur, de la reconnaissance de la patrie comme de tous les gens de bien….Dans cette douce attente, j’ai l’honneur d’être, monsieur le préfet…. »

Le préfet se laisse toucher…il ne peut malheureusement rien pour Véronique, mais il essaie d’intéresser à son sort le ministre de l’Intérieur….. « Il y a quelque chose de beau, écrit-il à ce haut fonctionnaire, dans la conduite d’une femme qui, pour éviter à son mari la honte et les peines corporelles qui devaient être le résultat d’une désertion, abandonne ses enfants aux soins d’une main inhabile et étrangère (le préfet écrit aussi mal que le maire !) et dissimulant sa faiblesse sous les habits d’un autre sexe, accepte jusqu’au dernier moment, dans un siège, le rôle pénible d’un homme de guerre…Il n’est pas dans mes moyens de combler les vœux que m’exprime la dame Vivien, mais j’ai pensé que, les faits dont elle justifie se rattachant au service des gardes nationales, il vous serait possible d’améliorer sa position en lui allouant un secours qui me paraît mérité. »

Hélas ! Le ministre de l’Intérieur ne pouvait rien, lui non plus, pour l’héroïne du siège de Maubeuge. Toutefois, comme la monarchie de juillet se montrait favorable aux vieux soldats de l’Empire, trop longtemps sous la Restauration, il transmit la requête de Véronique à son collègue de la Guerre.

Mais il était dit que la grenadière n’aurait pas de sitôt gain de cause. L’envie, la jalousie, la calomnie se mêlèrent de l’affaire de cette pauvre femme et de méchante gens adressèrent aux autorités des lettres…anonymes, cela va de soit….dans lesquelles son rôle véritable était mis en doute.

Un procès s’ensuivit, dont Véronique se tira pleinement réhabilité….mais elle n’obtenait toujours pas cette misérable place de concierge qu’elle avait sollicitée. En 1850 seulement…elle avait alors soixante dix ans…on l’admit avec son vieil époux, à l’Hospice de Corbie. Peu après Napoléon III…lui accordait une rente de six cent francs sur sa cassette particulière.

Mais la plus éclatante consécration de Véronique eut lieu en 1857. On venait de créer la médaille de Sainte-Hélène, destinée aux survivants des guerres du premier Empire. L’héroïne de Maubeuge la reçut, en même temps que le capitaine Coignet et d’autres glorieux de l’Epopée. Jacques Desmarest….les malingres ont la vie dure !....mourut en 1861, plus qu’octogénaire.

Quant à sa vaillante femme, elle vivait toujours lorsque le 30 août 1867, Napoléon III et l’Impératrice Eugénie vinrent procéder à l’inauguration solennelle du musée de Picardie à Amiens. A cette occasion, on avait groupé dans la cour du musée, les médailles de Sainte-Hélène du département pour les présenter à l’Empereur. Véronique était là, sa décoration au corsage, fort droite encore et très martiale d’allure, en dépit de ses quatre-vingt six ans.

L’impératrice s’intéressa vivement à son cas et lui fit l’honneur de l’entretenir en particulier pendant quelques instants. Pour la pauvre femme c’était enfin la gloire. Marie Jeanne Véronique Vivien, épouse Desmarest, excellente mère de famille et valeureux soldat de l’Empire, s’éteignit le 13 novembre 1869, dans sa quatre-vingt-huitième année.

……FIN…..

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MessageSujet: Re: Marie Jeanne Véronique Vivien, épouse Desmarest   Marie Jeanne Véronique Vivien, épouse Desmarest Icon_minitimeJeu 17 Déc - 13:12

Bravo JB, belle histoire
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MessageSujet: Re: Marie Jeanne Véronique Vivien, épouse Desmarest   Marie Jeanne Véronique Vivien, épouse Desmarest Icon_minitimeJeu 17 Déc - 21:13

Un proverbe dit que la valeur n'attend pas le nombre des années.
Ce récit tend à prouver par contre qu'il faut parfois des années pour récompenser la valeur. Rolling Eyes
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MessageSujet: Re: Marie Jeanne Véronique Vivien, épouse Desmarest   Marie Jeanne Véronique Vivien, épouse Desmarest Icon_minitimeJeu 17 Déc - 22:13

...... Marie Jeanne Véronique Vivien, épouse Desmarest Icon_sunny ......


Cher Percy....vous avez avec talent... donné la conclusion de cette histoire...!!!

Marie Jeanne Véronique Vivien, épouse Desmarest Salut

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MessageSujet: Re: Marie Jeanne Véronique Vivien, épouse Desmarest   Marie Jeanne Véronique Vivien, épouse Desmarest Icon_minitimeJeu 17 Déc - 22:50

en effet un belle histoire de femmes combattantes, ne le dites pas aux féministes, elles beuglent assez ça.
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MessageSujet: Re: Marie Jeanne Véronique Vivien, épouse Desmarest   Marie Jeanne Véronique Vivien, épouse Desmarest Icon_minitimeVen 18 Déc - 15:21

Jean-Baptiste a écrit:
...... Marie Jeanne Véronique Vivien, épouse Desmarest Icon_sunny ......


Cher Percy....vous avez avec talent... donné la conclusion de cette histoire...!!!

Marie Jeanne Véronique Vivien, épouse Desmarest Salut

Merci pour ce compliment, cher J-B !
Mais en définitive, le vrai talent est celui du conteur de cette bien belle histoire... Wink
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