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 A/ LA MARINE RESSUSCITEE DU PREMIER EMPIRE/rêve ou réalité

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MessageSujet: A/ LA MARINE RESSUSCITEE DU PREMIER EMPIRE/rêve ou réalité   A/ LA MARINE RESSUSCITEE DU PREMIER EMPIRE/rêve ou réalité Icon_minitimeSam 18 Sep - 15:02

Contrairement à ce que l'on pense, tout ce qui concerne la marine du premier empire est,et a été, abondamment traitée par les historiens: livres,revues spécialisées, thèses de recherche et travaux en tous genres effectués par des passionnés à partir des ressources des archives nous renvoient à une autre lecture de l'épopée navale de Napoléon.
Toutes les données convergent pour montrer la volonté de Napoléon 1er, en premier lieu,pour redresser, puis abandonner de fait un outil qui aurait du être indispensable à ses desseins, outil négligé et sacrifié par la révolution,oublié par le Directoire,ignoré par le consulat. L'empereur en avait-il la volonté, certes,en avait-il la capacité, tout le sens de la question est là.
On rappellera ici sans emphase ni prétention quelques données simples qui suffisent à elles seules à aller à l'essentiel, c'est à dire au bilan.
A la fin de la révolution le bel outil tout relatif de Louis XVI est dans un état de délabrement total.L'assemblée constituante va défaire les réformes élaborées par De Castries et revenir en arrière proche du système colbertien de 1689, par le décret du 21 septembre 1791 inspiré par Malouet dans lequel les ordonnateurs civils reprennent la haute main sur les services techniques et administratifs des arsenaux.Et de décrets en décrets, un des derniers en date du 2 brumaire an IV (23.10.1795) divise encore les services et entre en application jusqu'au consulat, avec au bilan plus de dix années de désordre et de confusion (archives nationales marine,cote DD2: ports et arsenaux) Les établissements militaires ne seront plus que ruine si l'on ne s'empresse pas de pourvoir à leurs rétablissements)
Constat
Dans l'affaire de Toulon pris par les anglais l'incendie est un désastre qui va peser lourd sur l'escadre de la méditerranée.Dès 1793, du fait de la guerre maritime, la dépendance française des espaces baltes et scandinaves va voir les approvisionnements s'effondrer, la France ne peut s'auto-suffire à elle-même: fer,bois,cuivre manquent, alors que la Royal Navy se les procure à discrétion.
"Nos défaites navales sont aussi le fait de cordages pourris et de mâts qui cassent.L'état de délabrement moral des marins qui ne touchaient plus leurs soldes amplifie le découragement qui était arrivé au point qu'ils portaient envie aux forçats qui eux,étaient nourris ,logés,habillés."
L'amiral Willaumez constate que ses marins sont nus,les magasins d'habillement sont vides.D'uniformes d'ailleurs il n'y en a point, la rareté ou leur absence fait qu'en réalité ils sont laissés à la libre appréciation de chacun pour se vêtir comme il le peut.Ce n'est que la réforme, mal appréciée du reste,introduite par Napoléon qui va doter les marins des uniformes de l'armée de terre avec capotes et shakos,inadaptés à la mer.Le décret imposant le port de l'uniforme est ignoré d'ailleurs chacun s'habillant suivant ses gouts: les gabiers aux boucles d'oreilles et cheveux longs noués par un ruban noir à hauteur de taille et un pantalon bleu évasé, un chapeau de castor..jusqu'aux officiers coiffés d'un énorme claque, certains portant culotte et d'autres pantalons, chaussés même de bottes d'écuyère ..(Philippe Masson)
Pour napoléon l'objectif est de militariser la marine.Il l'avoue lui-même quand il déclare"qu'elle plus heureuse idée d'avoir deux services pour une seule paye" paye qui d'ailleurs sera tronquée, quand elle sera versée,par l'achat des uniformes par les marins eux-mêmes sur leur solde.C'est méconnaitre ce qui fait la spécificité d'une arme qui n'est commune à aucune autre: atavisme, esprit de fronde,volonté de se singulariser, anglomanie liée curieusement à la détestation des anglais.Auquel il faut ajouter le mépris des généraux de l'armée de terre, elle choyée, adulée, allant de victoire en victoire,envers une marine qui lui est étrangère,et fortement critiquée:
Casabianca,pourtant un marin:La marine est un cadavre infect,
Belliard: les maudits marins ne sont pas meilleurs sur l'eau douce que sur l'eau de mer
Hoche:Notre détestable marine ne peut et ne veux rien faire.Parties incohérentes,indiscipline, orgueilleuse ignorance et vanité;
Bonaparte:Il n'y a rien à faire avec ces gens là, ils n'ont aucune puissance d'exécution.
Partout ailleurs l'effondrement est général, en particulier dans la marine de commerce : les positions maritimes de 1790 sont perdues: Antilles,St Domingue et puis la domination anglaise s'affirme au Cap,à Malacca, à Ceylan, en Australie..ajouté à cela l'embargo sur les pavillons neutres qui aurait un tant soit peu compensé les fournitures( catastrophe nationale, dit Emmanuel Le Roy Ladurie dans la préface du livre d'Alain Cobban " le sens de la révolution française" )
La marine de la révolution n'a,en fait, rien fait de plus que de changer le nom des bâtiments pour effacer ceux de l'ancien régime.Elle subit de plus les actes de mutinerie,les désordres entretenus dans les arsenaux par les comités révolutionnaires.Les équipages ont la même origine que du temps de Suffren: les volontaires sont rares, ne sont pas les meilleurs, et si la plupart sont inscrits maritimes trop peu nombreux, l'enrôlement d'office est effectué par la conscription,la" presse" entrée en vigueur de 1798 à 1815.Cette conscription qui déjà en 1793 déclencha les guerres de Vendée qui vont se terminer en 1795,avec le passif qu'elle va engendrer dans les années suivantes.Les hommes sont traités durement, seul moyen de gouverner la race des indociles.
Mais il y a surtout l'inexpérience à la mer.A Toulon par exemple en 1795 où seulement la moitié des 12000 hommes de l'escadre n'ont jamais pris la mer, et où les frégates se rendent sans avoir tiré un seul coup de canon parce que les canonniers ont le mal de mer.Pour combler les effectifs on va faire appel aux soldats (mousqueterie, canonnage) qui avec toute leur bonne volonté n'ont aucune formation ni compétence maritime alors qu'ils deviennent de plus en plus nombreux à bord des vaisseaux,ce qui va poser des antagonismes et des problèmes de commandement (Auguste Thomazzi, les marins de Napoléon)
A suivre...


















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MessageSujet: Re: A/ LA MARINE RESSUSCITEE DU PREMIER EMPIRE/rêve ou réalité   A/ LA MARINE RESSUSCITEE DU PREMIER EMPIRE/rêve ou réalité Icon_minitimeSam 18 Sep - 17:34

Suite..
Autre défaillance qui va perdurer, le système de santé.La situation désorganisée héritée de la révolution va laisser pour longtemps une dégradation de fait, bien qu'en 1792 un comité de salubrité navale eut émis de judicieuses suggestions qui ne seront pas suivies des faits, faute de moyens.L'arrêté du 12 novembre 1794 n'apporta aucune amélioration.A rappeler la portion congrue accordée à la marine :elle est représentée par un seul membre parmi les quinze du conseil de santé qui fusionnait les services armée/marine.Les besoins de la flotte étaient pratiquement méconnus alors que les maladies,la malnutrition,la promiscuité et l'hygiène étaient les premiers des facteurs de mortalité loin devant les pertes au combat.Malgré de dramatiques retards et sans aucun des avantages attendus, chirurgiens et médecins restèrent à leurs postes avec dévouement alors que leurs soldes subissaient d'innombrables retards.
Nota: en 1789 les admissions (4000 par an) dans les hôpitaux vont montrer une progression constante au plus fort des années suivantes: 58548 en 1793, 68852 en 1794 et ne diminuer que légèrement après.
Du consulat au premier empire
Au consulat le dénuement de la marine est persistant.Déjà que l'heureuse et chanceuse entreprise d'Egypte est significative d'un débarquement qui ne doit son succès qu'à la présence massive ignorée de la flotte française par les anglais; une telle rencontre eut été déjà le signe avant coureur de ce qu'il adviendra par la suite ..et encore si cette rencontre s'était produite l'expédition aurait été un fiasco et Bonaparte ne serait jamais devenu Napoléon.
Quand Bonaparte en 1798 est au bout de la jetée d'Anvers,ou encore sur celle de Dunkerque ou de Boulogne, se faisant passer pour le général "Lasne" il saisit parfaitement ce que lui disent librement les marins interrogés.Jetant aussi un regard sur la multitude de navires anglais qui croisent au large: avisos, bricks, frégates lourdement armés.Il a vu, il sait: inutile que Bourrienne en rajoute.Sur la route de Paris il demeure grave.Il comprend déjà que sans une marine l'invasion de l'Angleterre est douteuse sinon impossible.Il ne lui reste qu'à éviter que l'armée d'Angleterre ne devienne l'armée d'Orient.Il se projette en Egypte, avec la bénédiction du Directoire, trop heureux de le voir s'éloigner.(Max Gallo, le chant du départ)
Nombre de bâtiments sont paralysés par défaut de toiles, de cordage,d'artillerie,d'affûts.La maistrance,calfats, charpentiers,voiliers sont insuffisants.Le blocus de nos ports est de plus en plus étroit.A Brest l'arsenal est vide, et très mal équipé.En 1803 le "Duquesne" qui est capturé au Cap Français n'a que 275 hommes d'équipage à bord, y compris les malades, là où il en aurait fallu six cents.Avec la "Poursuivante" Willaumez ne trouve que 120 convalescents qui n'ont pas touché leur solde depuis quinze mois, sur les trois cents que devait comporter l'équipage, et il ne dispose que de 25 coups par pièce.La "Mignonne" qui l'accompagne n'a que dix canons au lieu de seize.Lorsqu'en 1806 l'escadre arrive en Martinique les coques,mâtures, sont en piteux état et le petit, trop petit ,arsenal de Fort de France est vide,totalement démuni.En 1811 l'escadre du Texel est dans le même état, toiles,poudres,embarcations font défaut et les fusils ne sont que des rebuts de l'armée de terre.Le vaisseau de 80 "Amsterdam" pourtant neuf reste à quai par défaut d'équipage.Et quand bien même ses affûts de 36,trop bas, sont inutilisables en mer.
Encore faut-il l'alimenter cette artillerie, le personnel en sous effectif est contraint sur certains bâtiments de servir les pièces tribord et bâbord en même temps.Et quand bien même...les habitudes qui consistent à tirer à démâter pour briser les haubans ou les mâts ne faisant que des trous dans la voilure,sont encore tenaces.Alors que les anglais tirent plein bois, avec une artillerie plus puissante, plus nombreuse et surtout bien servie qui fait des ravages, aggravés encore par l'utilisation de caronades que la marine française tarde encore à utiliser en combat rapproché.D'ailleurs les pertes françaises sont de ce point de vue sans rapport avec les pertes anglaises: à chaque engagement c'est un rapport de un à cinq au bénéfice des anglais.
En désespoir de cause on tente d'organiser une division de garde-côtes pour protéger le cabotage et lutter contre le blocus, mais il est impossible d'armer cette poussière navale constituée de petits bâtiments de faible tonnage, comme si le décret du 25 mai 1808 se suffisait à lui seul pour créer cette unité alors qu'on procède à la dissolution d'une unité de canonniers pour en faire l'équipage du " Ruyter", ce vaisseau de 74 qui a coulé au port par défaut d'étanchéité.Ce ne sont que des exemples qui dénotent l'aspect de l'état général de la marine.Il reste le symbole le plus frappant, en dehors d'Aboukir, celui de Trafalgar, d'une escadre française hétérogène, mal équipée, mal dirigée, mal entrainée dans une disposition de combat archaïque, en ligne de file, héritage d'une marine du passé,et pourtant supérieure en nombre, avec l'appui des espagnols, mais face à un adversaire bien commandé,bien armé,et bien amariné.Ce ne sont pas quelques beaux combats tout à fait honorifiques, comme la bataille du Grand Port,victoire française écrasante à l'ile Maurice, dont il faut relativiser l'importance, celle ci n'ayant opposée que quatre bâtiments de part et d'autres, qui contesteront la supériorité évidente des anglais.
Coup d'arrêt définitif aux espoirs et aux illusions à venir s'il en est.La marine de rade et de port est née, condamnée à faire des rond dans l'eau à l'intérieur des plans d'eau portuaires protégés par les estacades et fortins littoraux.
Adversaire qui va voir sa flotte de combat passer de 1795 à 1814 de 129 vaisseaux à 215, de 185 frégates à 489, ses navires marchands de 16800 navires à 24400.Dans le même temps le parallèle avec la flotte française est éloquent: le plan d'armement de Napoléon laisse rêveur et ne correspond nullement aux forces disponibles ni aux moyens nécessaires pour reconstituer une flotte digne de ce nom: en 1812 toutes les escadres française réunies à grand peine n'alignent pas cent vaisseaux mais la moitié, et encore.
A suivre.....





























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MessageSujet: Re: A/ LA MARINE RESSUSCITEE DU PREMIER EMPIRE/rêve ou réalité   A/ LA MARINE RESSUSCITEE DU PREMIER EMPIRE/rêve ou réalité Icon_minitimeLun 20 Sep - 12:40

Suite..
La guerre de course ne sera qu'un appoint,important mais insuffisant, tout juste un gêne pour l'Angleterre tout comme le blocus continental qui n'est pas imperméable imposé par l'empereur, et au final moins contraignant que le blocus maritime qui lui est dicté.Cette guerre de course qui va révéler néanmoins des noms célèbres, de Bavastro à Surcouf, preuve qu'un bâtiment bien armé, bien commandé peut mener avec succès des opérations de harcèlement suivies de prises innombrables, ce qui a manqué pour diverses raisons à la marine de guerre.Mais la guerre de course n'est pas une guerre d'escadre, les capitaines corsaires ne sont pas issus du grand corps et les vocations ne sont pas du même ordre,ne serait ce que par l'aspect matériel.
La partie de bluff qu'engage Napoléon avec ses plans d'invasion laissent les anglais pour le moins sceptiques, eux qui ne sont pas dupes des capacités de la marine française.La France avec ses 35 millions d'habitants pouvait envahir l'Angleterre mais elle n'avait pas de marine. Le royaume uni avec ses 15 millions d'habitants pouvait envahir la France mais n'avait pas d'armée.Napoléon abandonnera vite ses plans ubuesques.Si le but avoué est de faire en sorte que son adversaire, méfiant tout de même, creuse encore son déficit financier au point de s'effondrer, ce mauvais calcul va s'avérer plus catastrophique puisque la Navy va se décupler en augmentant encore plus ses dépenses colossales.Il est significatif d'ailleurs que le plan qui consistait à épuiser la marine britannique par la contrainte de mobiliser des forces importantes et donc de les faire naviguer pour assurer un blocus efficace de nos ports s'avèrera un bon et un mauvais calcul.
-Bon,parce qu'il suffit de constater les pertes importantes de bâtiments, sans combat, des anglais uniquement liées aux fortunes de mer.Parce qu'ils sont contraints de naviguer, ce qui augmente aussi leur expérience. Alors que celles de la marine française sont moindres du fait de sa faiblesse quantitative, bloquée dans ses ports et par voie de conséquence ne pouvant améliorer le service à la mer.Cela a été un argument de certains de ses amiraux, parfois sur ordre de l'empereur,qui croyaient ferme que ne pas exposer les bâtiments ou les ramener au port sans dégâts était en soi un succès, qu'une bataille évitée était une bataille gagnée.Ce qui ne fut pas le cas d'Allemand dans l'affaire de brulots de l'ile d'Aix.Encore moins celle de Linois, fuyant se mettre à l'abri en 1804, refusant le combat au large de Singapour devant une flotte marchande de vingt neuf voiles, très largement à sa portée, mais tout heureux d'avoir évité le pire.Cette affaire qui sera la risée de l'Europe et qui déclenchera la fureur de Napoléon " il faut que la marine se fasse une idée sur cette affaire aussi déshonorante"
-Mauvais,parce que la marine anglaise pourra compenser ses pertes par sa réserve importante ce que ne pourra jamais lui opposer la marine française.
Au final cette stratégie s'est avérée être un mauvais calcul, connaissant la capacité de l'adversaire,méconnaissant la sienne ou faisant semblant de l'ignorer.Et encore, si la marine britannique s'assure de la maîtrise de la mer sans conteste, elle ne reste pas moins active quant à la mise sur pied d'une armée de terre qui lui est indispensable mais somme toute pas nécessaire à sa survie:elle en fera démonstration en Espagne et notamment à Vittoria, dans cette autre guerre qui va contraindre Napoléon à mobiliser 300000 hommes face à une armée anglaise dix fois moins nombreuse, mais tout aussi aguerrie, utilisée de façon moderne aidée en cela il est vrai par une guérilla espagnole très active autant qu'efficace, mais si peu conventionnelle aux regards de la lourdeur d'une armée ignorant cette forme de combat où les règles d'école de guerre ne sont plus respectées.
Et puis par conséquence il y a les frustrations d'officiers de valeur entrainant des réflexions amères, telles celles de Troude qu'on ne peut soupçonner de lâcheté "on peut dire que pendant les deux dernières années de l'Empire il n'y eut plus de marine: les diverses destinations qu'on donna aux marins rendirent tout armement impossible..d'autre part les ressources étaient épuisées, la grande armée envahissait tout"
On ne peut que le constater: le décret du 24 janvier 1813 défait ce que Napoléon avait introduit, à savoir la militarisation de la marine. Par ce décret le renforcement des marins de la garde désorganise certaines unités en leur retirant ses meilleurs éléments, les troupes embarquées sont mises à terre pour passer à la guerre..De fait à Toulon on ne peut plus appareiller qu'en prélevant des effectifs d'un bâtiment pour les affecter à un autre: "de fait l'escadre ne peut plus sortir en force"
On rajoutera aussi au crédit de Napoléon, la création de l'Ecole navale, les études hydrographiques,le renforcement des ports: Rochefort ( la construction de Fort Boyard qui ne sera jamais opérationnel) Cherbourg, mais au détriment de Brest, de Toulon ou bien de Boulogne qui engloutira avec la suite que l'on sait des dépenses en poussière navale et infrastructures portuaires à hauteur de l'équivalent de trente vaisseaux de 74 qui auraient été bien plus utiles.Sans compter les ports étrangers comme la Spezzia, Venise ou Anvers qui seront perdus en 1814.A Anvers en particulier où à la fin de l'empire le chenal de l'Escaut n'a pas fini d'être exploré et d'où l'escadre n'a pas atteint une seule fois la haute mer.En parallèle les bâtiments anglais mouillent en toutes sécurité dans la rade des Basques,Sous Groix, à Belle-Ile, installent des corps morts à Quiberon, à Douarnenez qui devient "la baie des anglais", aux Glénans où ils dressent des tentes et cultivent des légumes, et d'où les équipages partent se ravitailler sur le continent, dans le golfe de Fos où l'escadre anglaise procède tranquillement aux réparations, alors que Toulon se barricade protégeant l'escadre française derrière une multitude d'estacades.
Napoléon va doter la marine des institutions qui lui sont nécessaires,réformer une administration qui en avait bien besoin: administration des ports,création des préfets maritimes,conseil technique des travaux,
conseil des constructions navales, conseil de guerre,etc...ne faisant rien de moins que de recréer ce que Colbert, De Sartine ou De Castries avaient initié, mais ayant le mérite d'une organisation qui faisait cruellement défaut et à l'origine de tous les déboires de la marine.
" La rigueur des comptes, qui va réduire les déficits,restera dans le mémoire collective comme l'âge d'or de l'administration impériale" ( G.Thuillet et J.Tulard, histoire de l'administration française)
Conclusion
Rigueur de gestion,règlements,organisation étaient pour le moins indispensable, mais ce n'est pas une fin en soi.Dans ce domaine napoléon, fils spirituel de Colbert plus que de la révolution reste fidèle à un défaut fondamental de la marine qui consiste à privilégier l'aspect administratif au détriment de l'opérationnel.Parmi tous les conseils que crée l'empereur pas un seul n'a d'attributions militaires, d'où la stratégie discordante trop ambitieuse par rapport aux moyens inadaptés.
Toutes les conceptions maritime de Napoléon furent entachées d'un vice initial qui d'avance les rendaient stériles.Le sort de la lutte entre la puissance navale et la puissance terrestre se jouera dans les immenses étendues de l'Est sur un énorme coup de pokerr. ( Jacques de Bainville)
Après Trafalgar l'empereur est vaincu sans le savoir ( Jean Tulard )
Les vaisseaux alliés n'étaient pas propres à faire la guerre: tant que l'égalité du nombre ne procure pas l'égalité des forces, la guerre devient un problème insoluble, la supériorité du nombre n'est plus qu'un écran trompeur masquant l'abîme (amiral René Daveluy, Stratégie navale)
A suivre...



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MessageSujet: Re: A/ LA MARINE RESSUSCITEE DU PREMIER EMPIRE/rêve ou réalité   A/ LA MARINE RESSUSCITEE DU PREMIER EMPIRE/rêve ou réalité Icon_minitimeMar 21 Sep - 13:29

Suite.
La régression qualitative des bâtiments est aussi en cause.Quand Jurien de la Gravière compare son bâtiment tout neuf,le "Centaure", avec un homologue britannique il ne peut que le jalouser et faire le constat que son colosse ne ressemble qu'à une marine de Joseph Vernet.Il n'en reste pas moins que les bâtiments français grâce au génie de ses concepteurs de talent vont jusqu'en 1780, avec l'apparition du vaisseau de 74 en particulier faire école mais aussi profiter à la marine anglaise qui va le copier mais surtout le perfectionner grâce à ses prises pour augmenter ses qualités surtout en matière d'armement, ce que la marine française sera incapable de faire par défaut d'approvisionnemnent et encore moins par défaut de modernisation.
Autre handicap majeur est le manque d'équipage confirmé: le personnel est composé d'une multitude de nationalité à l'origine de difficultés linguistiques, alimentaires,comportementales qui vont se dégrader pour aboutir en 1812 à des actes de mutineries et de désertion.Il en est de même pour le recrutement que Decrès, tel le roi Hérode, ministre incontournable autant bon administrateur que bon courtisan va innover en se bornant à enrôler de force des indigents, des miséreux, des résidus de bataillons ou d'enfants trouvés à un point tel que l'opinion qui va s'en émouvoir qualifiera cette entreprise de "massacre des innocents" en référence à la bible, scènes illustrées par Rubens, Nicolas Poussin et bien d'autres.
La défense des colonies dès 1803 à la reprise de la guerre ne fera que renforcer les désastres qui vont se solder par de nombreuses captures qui alimenteront les pontons anglais de triste mémoire.En 1807 l'arrondissement de Brest comptera à lui seul 30% de captifs.Les échanges de prisonniers cesseront d'ailleurs à l'initiative de Napoléon qui ne pourra les honorer faute de détenir suffisamment de prisonniers anglais, privilégiant les échanges au profit de ses officiers supérieurs. L'affaire Villaret Joyeuse dont la garnison est faite prisonnière en Martinique est révélatrice de l'état d'esprit de Napoléon, furieux de cet échec,consistant à refuser cet échange faute de contrepartie, garnison qui ne sera libérée qu'à la chute de l'empire, à l'exception de son amiral et de son état major.
Tout était réuni pourtant pour que la France soit une puissance maritime de premier plan.Dès le XVIIème siècle jusqu'à l'apogée du siècle suivant les expéditions de recherche scientifique, hydrographique, météorologique ainsi que la formation des officiers ou la construction navale, en bref toutes les disciplines propres à la marine devaient la conduire à jouer un rôle important " la dialectique d'une France terrienne vers un France ouverte vers le large" comme le pronostiquait Michel Morineau.

La révolution d'abord, l'empire ensuite par manque de moyens évidents, ont cassé cet élan pour longtemps pour laisser à la marine anglaise un hégémonie incontestable sur toutes les mers du globe.
" Si les guerres napoléoniennes n'avaient pas écarté la France des échanges mondiaux, l'Angleterre aurait moins facilement imposé au monde sa férule" ( civilisation matérielle, économie et capitalisme, Le temps du monde par M.Baudel)
Napoléon avouera un peu tard au mémorial de St Hélène ce qui semble sa meilleure des conclusions :
"Il est vrai que j'ai les bras assez forts pour arrêter d'un coup de brides tous les chevaux du continent, mais je n'ai pas de brides pour arrêter les voiles anglaises, et c'est là que gît tout le mal.Comment n'a t-on pas l'esprit de le sentir"


Sources:
en dehors des citations incluses dans le texte, des passages sont extraits:
- de "l'histoire de la marine française".Etienne Taillemitte,membre de l'académie de marine .collection Tempus.
- de "l'Amiral Willaumez".Amiral Maurice Dupont,professeur de l'école de guerre navale,président du comité de documentation de la marine.ed Tallandier.
- des articles de Philippe Masson,membre de l'académie de marine, parus dans la revue "Napoléonica"
A suivre....







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MessageSujet: Re: A/ LA MARINE RESSUSCITEE DU PREMIER EMPIRE/rêve ou réalité   A/ LA MARINE RESSUSCITEE DU PREMIER EMPIRE/rêve ou réalité Icon_minitimeVen 24 Sep - 15:20

Suite...
Il est de bon ton de croire ou de faire croire que les échecs de la marine ne sont attribués qu'à sa propre incompétence, à celle de ses amiraux ou de ses marins.Pour une part certainement.Napoléon lui-même en était parfois convaincu,pour l'avoir pensé un moment quand il était ailleurs et partout, sauf en mer, ou même à St Hélène quand il dictait ses mémoires.Ses réflexions sur ses amiraux à un moment d'emportement, après coup ou longtemps après sont interrogatives voire injustifiées.Par certains côtés il n'est pas faux de le dire mais ne pas en faire une généralité, et encore faut-il prouver les données qui conduisent à l'affirmer, à l'infirmer, pour les justifier.Tout comme il est admis que les marins quand ils étaient amarinés et dirigés par des officiers de valeur n'avaient pas à rougir de leur bravoure et leur courage,nombre d'exemples peuvent en témoigner.Napoléon obnubilé ou aveuglé par ses victoires terrestres, sa politique, ses ambitions, sa grande armée ,outil admirable s'il en est et dont on a vu aussi ses limites, n'a pas pris suffisamment conscience que la marine n'était pas un outil secondaire seulement utile au transport de troupes.Que sans moyens humains et matériels,de plus enfermée dans ses ports elle ne pouvait en aucun cas consolider ses propres acquis, ni concourir, vu son extrême faiblesse congénitale à compléter ses victoires.Bien mal lui en a pris.Si Napoléon avait vraiment cru en la marine il aurait mis les moyens nécessaires pour la redresser véritablement, profiter de la période de paix pour entreprendre la remise en état de la flotte.Il a tout misé de préférence sur la grande armée qui le lui rendait bien, et il n'en avait ni le temps ni les moyens.Son seul ministre de la marine, à défaut d'en avoir d'autres,inamovible,incompétent, détesté par tous ses amiraux,n'a jamais cru un seul instant que la marine dont il avait la charge pouvait contrecarrer l'hégémonie de la marine anglaise.Il n'a agit qu'en bon courtisan auprès de l'empereur, alors même qu'il ne croyait pas en lui.
"l'empereur est fou, tout à fait fou, disait-il à Marmont ,et nous jettera tous autant que nous sommes cul par dessus tête,tout cela finira en catastrophe épouvantable"
Mais comme tant d'autres aussi sous l'emprise du culte voué à l'empereur,feint ou avéré, pour obtenir ses bonnes grâces, ce qui ne faisait pas la particularité de la marine.Napoléon a toujours cherché le "grand timonier" parmi ses amiraux, il ne trouvera jamais: ceux sur qui il fondait beaucoup d'espoirs avaient disparu, Latouche-Tréville, Bruix...ou d'autres morts au combat, Baste,Brueys d'Aigalliers, Dupetit Thouars,Magon de Médines...pourquoi avoir maintenu ce ministre même après les cent jours, lui qui porte une lourde responsabilité aussi des désastres de la marine.Mais cela n'explique pas tout.Le manque de vision de Napoléon dès la campagne d'Egypte dans l'absolue nécessité de pourvoir la marine de capacités suffisantes y est pour beaucoup, là est l'essentiel et la réalité est bien celle-ci.
"La marine n'était pas faite pour lui, elle était au dessus de ses moyens.Il n'a manqué qu'une chose au vainqueur d'Austerlitz, le sentiment exact des difficultés maritimes.Ses explosions de colère l'ont presque toujours injuste et ont nui au bien de son service, presque autant que la prétendue mollesse de ses amiraux".Les marins de Napoléon,Auguste Thomazzi.
Jean Paul Gillet, St cyrien, dans son livre "la marine impériale,ed Giovanelli" avec des approches plus nuancées en arrive aux mêmes conclusions:
"En voulant réduire la puissance navale et économique anglaise, l'empire a contribué à façonner la prépondérance de l'Angleterre durant 150 ans..Dans l'isolement de St Hélène, Napoléon n'a pas oublié la marine: il lui fallait ce désastre pour le rendre au sentiment du réel"
On aura beau dissocier la valeur de la marine à celle de la grande armée il n'en reste pas moins que la première a eu son Trafalgar et la seconde son Waterloo.Ayant dit cela on aura tout dit.On épiloguera longtemps sur la volonté de l'empereur de faire renaitre une marine et de la léguer en héritage.Comment lui ne pouvait-il savoir qu'il courrait après des chimères.NDLR.
FIN.
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Flahaut




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MessageSujet: Re: A/ LA MARINE RESSUSCITEE DU PREMIER EMPIRE/rêve ou réalité   A/ LA MARINE RESSUSCITEE DU PREMIER EMPIRE/rêve ou réalité Icon_minitimeMar 14 Juin - 17:04

J 'ai vu une vidéo assez étonnante.Le dernier vaisseau de 74 ex Duguay Trouin,capturé à Trafalgar (son commandant étant tué) a été coulé par les anglais en 1947.Il restait une coque encore tres convenable.La Marine anglaise l'a offert à la France pour restauration et cela à été décliné....alors qu'on s'échine à construire l'Hermione .Je veux bien qu'apres la guerre ,il y ait d'autres soucis mais quel gachis !!! La coque avait tenu 150 ANS . C'était du chef d'oeuvre en péril.
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A/ LA MARINE RESSUSCITEE DU PREMIER EMPIRE/rêve ou réalité
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