L' entrée à Digne par la rue Mère-de-Dieu, quand on descend par les Thermes :
M. Duval, préfet des Basses Alpes, devenu depuis le département des Alpes de Haute Provence, a reçu la veille, le vendredi 3 mars, une dépêche du préfet du Var, lui annonçant le débarquement de Napoléon à Vallauris, et son avance probable en direction des Basses Alpes. M. Duval convoque aussitôt le général Nicolas Loverdo, commandant la garnison du département, et le capitaine de gendarmerie.
Loverdo a 132 hommes casernés à Digne, et peu de réserve en munitions. Les autres troupes sont disséminées dans les places fortes près de la frontière. Le préfet lui apprend le débarquement de Napoléon à la tête de 2 à 3.000 hommes, ce qui équivaut au nombre de rations demandées par Cambronne à Cannes. M. Duval lui demande si on peut résister et Loverdo répond qu'il n'est pas sûr de ses troupiers car «il y a 4 jours, ils ont crié «
Vive l'Empereur», que j'ai voulu en punir 4, et qu'ils m'ont déclaré que si j'en punissais un, je devais les punir tous. Ce qui m'a mis dans l'obligation d'étouffer l'affaire. D'ailleurs il n'y a pas une seule cartouche à Digne, cependant je vais en envoyer chercher à Sisteron et nous essaierons cette troupe.» C'est le récit de Joseph Barbier le secrétaire général de la Préfecture.
Le rapport de M. Duval au ministre de l'intérieur est aux archives du département: «Il fut enfin agité la question de savoir si on avait le temps suffisant pour rétablir en arrière de Digne un autre point de résistance à Sisteron, situé au delà d'un pont d'une seule arche, sur la Durance, et dominé par une fortification pourvue de quelques pièces d'artillerie abandonnées depuis longtemps et sans affût.
Le général commandant du département, seul compétent pour discuter la possibilité de cette mesure, reconnut que lors même qu'on aurait assez de temps et des moyens pour faire sauter le pont, l'on resterait exposés à voir la troupe ou démolir des maisons en tête du pont pour former à l'instant un radeau, ou se diriger en dessus ou en dessous de Sisteron pour y faire la même opération avec d'autres bois ou pour faire usage des bacs nombreux qui s'y trouvent placés.»
A la fin de l'entrevue, le préfet et le général Loverdo conviennent de garder le silence sur cette dépêche venue du Var. La nouvelle sera rendue publique le 4 au matin par les estafettes envoyées par les maires de Castellane et de Barrême, ce qui rend la nouvelle impossible à cacher.